Maverick est en quelque sorte immuable. Peu émotif, peu enclin aux débordements d'humeur, il affiche un éternel sourire distrait. Pacifiste convaincu, il ne s'énerve pas, et préfère la fuite à toutes les autres options possibles. Il est lâche. Mais on lui pardonne, grâce à son éternelle gentillesse. Il est profondément paternaliste et protecteur.

Maverick est adroit de ses mains, et il cumule un nombre de petites passions telles que la couture, le dessin, la musique, qu'il exerce en solitaire. Adroit de ses mains, il aime se concentrer sur des taches minutieuses et supporte asse peu d'être déconcentré. A l'inverse, l'homme est socialement inapte, de son propre aveu. Ses rares amis consistent en quelques prêtres avec lesquels il parle de foi, et ses contacts sociaux se résument en règle générale aux saluts cordiaux le dimanche après la messe. Seule exception à la règle: il apprécie particulièrement la compagnie de jeunes gens, bien qu'il soit en totale déconnexion avec ce qu'ils vivent. Il s'est récemment trouvé une passion pour internet, et bien qu'il ne sache pas encore distinguer un statut facebook d'un champ de recherche google, il s'émerveille devant ce formidable outil et a une centaine de citations de la bible en favoris. Il est fasciné par Tumblr et par tout ce pastel partout, bien qu'il se demande sincèrement si toutes les idées qu'il voit passer soient en accord avec une vie dans la grâce. Il n'est jamais tombé amoureux, et n'a jamais connu de relations de ce genre. Et si il porte encore, vieux souvenir, son anneau de chasteté, symbole qui le réserve pour sa future épouse, au fond de lui-même,il a déjà laissé tomber l'affaire.

Une pratique du sacrement de la confession assez assidue fait de lui une assez bonne oreille pour écouter et conseiller. Méfiance toutefois sur les conseils qu'il prodigue: ses valeurs morales ne sont jamais loin, et Dieu sait qu'elles sont marquées. Ce qui nous emmène au défaut le plus pénible de Maverick pour son entourage restreint: il ne peut s'empêcher de juger. Bien qu'il tende a être meilleur de jour en jour, c'est une bête noire qui l'accompagne tout le temps. Il juge selon des valeurs qu'il trouve pourtant progressistes, mais un fond épais de bigoterie et de foi aveugle l'empêche souvent de faire preuve de totale empathie. Dieu n'est jamais loin de son discours, et l'église catholique non plus, avec beaucoup des travers qu'on lui connaît. Allié avec une véritable volonté de servir, il peut devenir sans le vouloir un ennemi redoutable de bienveillance et de conseils biaisés.

Maverick pousse son premier cri à Foxglove Valley, au coeur d'une calme nuit d'été. Il est miraculeux, un peu, cet enfant, dernier fils d'une famille de sept enfants, et tout le monde est surpris de voir Alysha, sa mère, accoucher sans encombre.

Une semaine plus tard, l'enfant est baptisé dans l'allégresse, et son plus vieux frêre, éternel parrain du reste de la fratrie, le serre fort dans ses bras. Ce n'est qu'un bambin, un genre de petit haricot noir qui babille dans sa tenue de cérémonie, mais il est étrangement calme, pour un bébé. "On dirait qu'il a vu Dieu sans les yeux, et qu'il ne s'en est jamais remis", commentera plus tard sa mère devant la placidité et la docilité de l'enfant. Si seulement elle avait su à cet instant à quel point elle avait raison.

Maverick a huit ans, et il reste presque anormalement calme. L'enfant ne crie pas, ne hurle pas, n'est pas capricieux. Il a l'oeil vif, est serviable, bien que très timide et peu courageux. Tout Foxglove le connaît, le petit Maverick, dans sa robe blanche, le dimanche, à la messe. Il assiste le prêtre avec une ferveur religieuse qui force l'admiration, et ne loupe pour rien au monde un évênement de la paroisse. Maverick écluse les unes après les autres les bibles pour enfant, ne sort pas sans son chapelet, et prie tous les soirs pour la santé et la protection du Seigneur sur lui et les siens. "Quel enfant charmant!", dis-t'on aux parents. Et aux parents d'acquiescer. Il est vrai qu'il n'est pas un modèle standard, mais bon. Il paraît que ça s'arrange à l'adolescence.

Mais à l'adolescence, Maverick est toujours aussi singulier. Enfant solitaire, ne trouvant de plaisir que dans la lecture et dans les travaux manuels, il est un élève globalement moyen, sans odeur, sans saveur, et sans couleur. Pour tout le monde, sauf pour Chad et sa clique. Chad, c'est un crétin, selon lui. Trop de football et de coups dans la tronche, et pas assez de saines lectures. Sa seule passion, à part ce ballon qui ne présente pourtant qu'un intérêt limité, est d'enfoncer brutalement la tête de Mav' le naze dans les toilettes. Maverick comprend que la solitude n'est plus une option. Il s'engage dans le groupe pastoral de son lycée, et devient président du groupe de chasteté, peu de temps plus tard. On lui reconnaît un certain talent pour conseiller, et pour raconter la Bible. Un jour, le prêtre accompagnateur le prend a part, et lui confie un prospectus, peu de temps avant les examens finaux. Pour Maverick, c'est une révélation. Il partira au séminaire, et il deviendra prêtre. Car c'est là que Dieu le veut, et là qu'il pourra le servir.

Le jeune homme est entré au séminaire, et il vit les plus belles années de sa vie. Il prie de plus en plus, devient un puit de science en ce qui concerne les textes sacrés, et rapidement, il enfile pour la toute première fois le col rigide qui l'a fait rêver pendant cinq ans. C'est a cette période que la première vision, qu'il prend comme un signe du Seigneur, arrive a lui. Il voit une grande maison, au fond d'une allée entourée de chènes. A l'intérieur, une femme qui vient de donner naissance à un tout petit bébé qui gigote. Il rit. Seigneur, m'as-tu envoyé protéger les petits enfants?

Il officie ses premières messes, tremblant mais plein de foi. Ses premières confessions, aussi. Il se rend compte, là, de l'horreur de l'humanité, et voit, étalé, de l'autre coté de la grille, tout ce qu'elle peut faire de pire. Il garde le moral, comme il le peut. Il soulagera la terre de ses maux, dans la limite de ses moyens, et tournera ses brebis perdues vers la lumière du grand berger. Ses visions deviennent de plus en plus présentes, et il prie de toute son âme pour que bientôt, cela se termine.

Le Père est fatigué. Très fatigué. Il a constamment envie de vomir, et ne peut plus supporter les visions qui sont devenues de plus en plus glauques avec le temps. Pourquoi se voit-il maltraîter ces gens si maigres, et pourquoi s'entend-il les appeller nègres? Il appelle le Seigneur, chaque nuit. Le Seigneur ne semble pas se préoccuper de son sort. Qu'ais-je fait pour te déplaire, Seigneur? Maverick se repent. Encore, et encore. Sans résultat. La nuit, il pleure, à genoux devant la croix.

Seigneur, Seigneur, pourquoi. Les visons, de plus en plus terribles, s'enchaînent, et le prêtre est désemparé. Il n'est plus fiable, pour sa paroisse, il le saît, mais en l'absence de signes, comment réagir? Que faire? Maverick prends le temps de réfléchir, longuement. Il a ving-huit ans. Il rend son col. Il n'est plus digne. L'église de Foxglove Valley ne chantera plus avec lui le dimanche. Il se déteste.

Pendant un an, il déprime. Il boit, un peu, mais c'est déjà trop. Il est seul. Trop seul. Il prie, et finit par oublier de prier. Seigneur, viens me chercher. Et, contre toute attente, le signe est arrivé. Une possibilité d'oublier, de faire autre chose. De protêger les autres, ceux dans le même cas que lui. C'est Lui qui a mis cette opportunité sur sa voie. Il le sent au plus profond de son être. Il accepte. Il se fait tatouer tout le bras, pour se rappeller d'une seule chose: le Seigneur n'abandonne jamais ses enfants.

Une nouvelle mission l'appelle, maintenant. Il sortait juste d'une séance de retouches. Une petite jeune fille, par terre, dans un état pitoyable. Il déglutit lentement, avant de s'en approcher. Sans même réfléchir, il a compris. D'un geste ample, il la soulève, pour la mettre à l'abri. Le Seigneur et ses servants n'abandonnent jamais les brebis.

Dans cette maison aux chènes centenaires qui entourent l'allée centrale, un petit enfant naît.Les parents le regardent, heureux. Maverick est heureux aussi.

La Nouvelle Orléans bruisse et s'agite en cette période de carnaval. Le père n'y est pas pour s'amuser. Il s'approche d'une jeune femme, noire, et lui ouvre la bouche d'un geste sec. Il regarde ses dents. Derrière lui, sa femme approuve avec un cri de joie. Ce sera sa nouvelle suivante. Maverick se sent mal.

Un d'entre eux, un de ces "nègres", mot qui fait vomir Maverick, a tenté de s'enfuir. Le père est à cheval, accompagné de ses hommes. Il rit comme un coup de tonnerre, quand ils le rattrapent. Il ordonne, comme si de rien était, de le fouetter. Et de trancher sa main. Maverick a vomi.

Beaucoup d'autres souvenirs ressemblent à celui-là. Maverick pleure en serrant son chapelet de chène noirci dans ses mains.

L'esclave a en lui une force que le maître ne soupçonne pas. Il fait nuit, et la fumée monte. Le père se réveille le premier, et regarde par la fenêtre. Les issues sont bouchées. Si il sort, ce sera un massacre. Si il reste, il périra dans les flammes. L'enfant pleure, il est plus vieux. Le père choisit. Il prend sa famille dans ses bras, il les serre, et il attend. Au loin, l'allée de chênes brûle, comme une route de feu vers l'enfer dont il n'aurait jamais du sortir.

Nom:Thomas Egbert

Profession:'Propriétaire d'une plantation de sucre

Avatar:The Major-Hellsing

Age:48 ans