Et vous êtes là, tous les deux Deux ombres, deux êtres – au beau milieu de l’univers Deux images, deux mystères – plus un microcosme La terre tourne autour de vos mains jointes – c’est le centre de la galaxie Sur vos doigts il y a du sang et des étoiles tombées du ciel Et plus rien n’existe – car tout est entre vous Entre vos deux corps Entre vos deux souffles Entre vos deux vies
Quand on se tient par la main le néant est moins effrayant L’abîme, un peu moins angoissant En plissant les yeux on peut même voir – illusion peut-être – un peu de soleil dans le noir Les doigts de Amélia – tremblants – les doigts de Quinn – gelés : le début du Monde. Quinn ferme les yeux – la nuit est trop lumineuse – les sensations s’estompent - et il ne veut pas oublier il veut graver cet instant dans sa mémoire il veut que cette minute rejoigne l’éternité Tirer ces quelques secondes hors du temps Oublier l’avant et l’après Et garder – juste cela – la main d’Amélia – cette main (frêle douce et frémissante) dans la sienne ses doigts entre ses doigts sa peau contre sa peau et rien d’autre
Mais Amélia a besoin de parler elle a le cœur trop lourd Tous ces ectoplasmes prisonniers en elle l’empêchent de respirer (il faut qu’elle ouvre la cage qu’ils s’envolent hors de son esprit qu’ils se dissolvent dans le ciel – loin, très loin au-dessus de sa tête) Son rire est si triste – c’est parce qu’elle suffoque. Et Quinn sait très bien ce que c’est, d’étouffer – d’avoir des spectres dans la gorge - alors il sert un peu plus la main d'Amélia dans la sienne (si il la lâche, il a peur qu’elle disparaisse ; il a peur qu’elle s’évanouisse, comme un songe. C’est si fragile, un rêve. Le moindre geste – et tout explose, tout s’effondre). Quinn le sent – Amélia est sur le point de se briser. Sa voix se fêle – mots ébréchés Et les nuages bleus et noirs sur sa peau ne s’estompent pas, traces de malheur Dire que c’est moi – c’est moi, qui t’ai fait tout ça Je suis si désolée Amélia J’aimerais tellement t’aider Je te regarde sombrer – sous mes yeux tu t’éteins Tu es avec moi (je tiens toujours ta main) mais déjà si loin Et c’est un peu à cause de moi J’aimerais tellement t’aider – tellement, tellement …
« comment on fait pour faire abstraction ? » Je ne sais pas (Il faut accepter de se perdre en route)
« comment les gens, ils font pour être aussi inconscients de leurs soucis ? » Je ne sais pas (Ils sont forts et nous on est faible, tragiquement faible)
« pourquoi on n'est juste pas normaux ? pourquoi on peut pas vivre en paix quinn ? » Je ne sais pas Amélia ; je ne sais pas
« est-ce que tu l'as toi, ta paix intouchable même en gardant ton histoire vécue ? »
« Je ne sais pas encore. Moi aussi j’aimerais oublier beaucoup de choses. Mais de toute façon c’est trop tard pour moi. Je suis moche à vie. C’est marqué sur ma face et puis c’est dans mon corps aussi. Tout ça, je veux dire… Le mépris, le dédain, c’est juste de la comédie. Je sais même pas comment ils font pour ne pas (me) voir.»
Mais ça, tu ne le répètes pas, hein, Amélia – tu le dis à personne que je mets du rouge à lèvre sur mes blessures et de la poudre sur ma vie. C’est un secret entre nous deux – entre nos deux mains.
« Mais je suppose que je suis un peu plus heureux ? Peut-être pas en paix mais… Je suis tranquille ici. Oui, j’ai toujours mon histoire et c’est moche, mais je peux pas faire semblant de pas voir. Je ne suis pas aveugle. Même quand je ferme les yeux, c'est encore là. Encore et toujours là. Mais j’espère… Ouais, j’espère que malgré ça, malgré tout ça, je la trouverai, cette paix. »
Regarde-moi. Regarde-moi être sincère – sans fard et sans artifice – sans masque
« Et puis… J’espère que toi aussi tu la trouveras. » A peine un souffle.
Quinn regarde Amélia dans les yeux – ses yeux plein de larmes. Ses yeux - flamboyants comme deux fleurs d’ancolie – où se reflète requiem sensible la danse impitoyable des tous ces souvenirs qui la font souffrir. Alors soudainement Quinn réalise. Rien n’est figé. Tu peux échapper à ces fantômes. Je refuse que tu te laisses bouffer J’en ai marre d’être lâche j’en ai assez d’être peureux Je ne fuirai pas face à tous ces monstres qui te hantent Parce que Amélia, non – j’ai pas envie, j’en ai pas envie, qu’ils t’avalent pour de bon.
« Ecoute-moi. Je – j’ai ; ‘fin. Tu… Je sais bien c’est très douloureux ce que tu vis, là -- et que tu as très très mal… Mais t’es pas obligée de vivre avec cette souffrance parce que --. »
Il respire – lentement, profondément. Je vais tomber. Ne lâche pas ma main.
« Parce que si tu veux, on peut dissiper tout ça – la peine. L’angoisse. (On peut dissiper tout ça et comme ça toi tu resteras.) Et puis on peut en faire quelque chose de plus – de plus joyeux oui, avec ces trucs-là. De meilleur. On peut construire de belles choses sur les fondations du chagrin. »
Confis-moi tes souvenirs Amélia Donne-moi la clef de ta boîte de Pandore à toi Oui – on peut tout changer On y arrivera, à te sauver On y arrivera On va essayer
on est nés de l'amour conçus pour revivre heureux et avoir plein d'enfants car c'est ce qu'ils auraient souhaité lia comme comme ton ancien toi car on a une seconde chance et que oh on se laisse détruire sans la saisir l'avenir n'est certes pas clément (mais n'est-ce pas un peu de nos fautes de ne pas réagir) apprends-moi quinn (tu es une ((belle)) rencontre tu sais du genre de celle à qui on fait confiance car ils sont tellement cassés qu'ils n'ont aucune intérêt à faire du mal) et ta main qui serre la mienne, je n'ai jamais connu aussi beau étau et ta main qui serre la mienne, donnant une valeur sûre à cette relation dansante (un pied à l'autre l'équilibre tellement fin fragile qui menace de se casser si on s'appuie trop dessus) (t'es pas laid, quinn) t'es tellement pas moche t'es tellement pas tout ce que tu racontes et ça m'attriste que tu en sois persuadé à un point où t'en es incertain ((fermer les yeux)) souvent je me le dis que juste fermer les yeux et se laisser sombrer continuer de respirer de manger de fixer les personnes de leur sourire mais de fermer les yeux de vivre sans but juste e x i s t e r ça serait plus simple car peut-être que quelqu'un nous redonnera l'espoir un seau d'eau froide qui nous éclate à la tête et qui nous rend compte que t'es perdu (je l'attends cette douche) cette douche de sourires cet amour frais sincère qui nous fait rire je l'attends ce conte de fées un jour il viendra peut-être qu'on sera pas dans le même, peut-être qu'on sera tous les deux des jolies princesses en robe de soie on aura le visage tellement étincelant on sera tellement heureux que les limites de l'univers ne suffiront plus pour nous retenir tout entier (mais pour l'instant) je suis pas assez forte pas assez courageuse trop hantée (toi aussi visiblement) tes yeux m'absorbent et tu as l'air concentré résolu (à quoi tu penses quinn) tu ne me lâches toujours pas et ce n'est pas une décision que je conteste bien entendu ((tu recommences à parler)) c'est donc ça, ton second cadeau avec la renaissance ce don, là il est vrai que c'est plus judicieux de tout reconstruire que de tout raser mais je ne mets décidément pas l'idée de les rejoindre de côté disons que ça sera le temps de me décider ça me permettra de mieux vivre oh oui tu serais prêt à faire ça pour moi ? je veux dire on se connaît à peine enfin- pas que je te fais pas confiance mais c'est assez intime comme procédé, certes moins drastique que le mien mais- tu verras sans doute des trucs pas cool et j'ai pas envie de te faire vivre ça. je sais pas dont tu as besoin pour, mais dis-moi et je ferai. je ferai, car avec toi tout paraît plus facile.
No sky, No world, No heavens Only the tiny seed of a world to be seen in a crevicefeat Amélia
Sera-t-on un jour heureux ? Quelques fois je cède et je me laisse aller au gré de la lâcheté – quelques fois je décide volontairement de me laisse aveugler – parce que ça fait du bien, ça fait tellement de bien, parfois, de tout lâcher et de s’abandonner, sans réfléchir, sans résister – parfois je garde les yeux ouverts malgré la lumière Et j’ai envie d’y croire – j’ai envie de croire que moi aussi j’y aurais droit, à cette petite illumination personnelle (pourquoi pas ?) Cette petite flamme rien que pour moi – oh, si t’existe Dieu, je te promet, je te le jure, j’en prendrai soin, je la chérirai cette étincelle j’en ferai un flambeau un incendie je la porterai à bout de bras on ne verra plus qu’elle et moi Mais tout ça – la lumière - ce n’est qu’un rêve – et soudain je me rappelle – que Dieu n’existe pas – qu’il n’y a que la réalité en face de moi La réalité – et ses fils froidement implacables, ses chaînes cruellement impalpables La réalité qu’on se traîne toutes et tous (le réel est une geôle - on est ses prisonniers) Soudain je me rappelle qu’il n’y a pas de lumière – c’est juste un trompe-l’œil, une illusion un piège qu’on nous tend – pour s’amuser, pour passer le temps J’ouvre les yeux – et à nouveau, je suis dans le noir Sera-t-on un jour heureux ? C’est un rêve de gosse – et je ne suis plus un enfant – je ne suis plus innocent depuis bien trop longtemps Je suis comme les autres – comme eux – une silhouette grise un ébauche morose errant dans un monde triste et angoissant J’ai dix-sept ans – et déjà perdu tout mon temps - Et malgré tout – je peux pas m’empêcher d’y croire A la lumière Aux couleurs Au bonheur C’est vraiment con, un être humain – même brisé même effacé anéanti oublié Ca continue toujours et toujours d’espérer Mais parce que tu es là, Amélia Parce que tu es là – et que tu tiens ma main trop froide trop lourde Pour la première fois depuis longtemps je ne m’en veux pas Je ne m’en veux pas – d’espérer comme ça Je m’oublie un peu – pour ne penser qu’à toi Tes souvenirs moches – ces fils fils tendus entre nos doigts – contre ma laideur à moi Triste échange piètre mélange J’aimerais t’aider plus que cela Amélia Mais malheureusement je ne suis que moi – Quinn (à peine un nom, d’infimes signes) Je suis moins que rien, moins que néant – je suis ignominie souillure ressentiment Je ne sais pas me défendre juste attaquer juste frapper et je t’ai fait du mal à toi la clarté à toi l’humanité Parce que tu es – parce que tu as – tout ce que je n’ai pas – et que je suis jaloux, oui, je suis tellement jaloux de toi Amélia (nuit à contre-jour – infamie contre sainteté) Alors le moins que je puisse faire pour que tu me pardonnes – pour que je me pardonne (l’espoir, je dis : l’espoir) c’est de rendre ton monde à toi un peu meilleur Avant de retourner là d’où je viens – parmi toutes ces silhouettes grises, avec les miens.
« Oui, je crois. »
C’est vrai, on se connait à peine – on vient de se saluer, on n’a fait que se blesser – insultes contre coups – amertume contre bleus – et pourtant et pourtant Je n’ai plus rien à perdre – et toi, tout à gagner Tu me fais confiance Amélia ?
Un sourire – sincère, épuisé – c’est mon cadeau pour toi, Amélia. C’est tout ce que je peux t’offrir – mais je ne le dirai pas Comme d’habitude Je choisirai d’autres mots pour être dans le monde J’ai trop peur de me mettre à nu – je suis lâche Et malgré tout, malgré moi - tu me fais confiance, Amélia.
« T’en fais pas. » (t’en fais pas pour moi) (je me débrouille je sais comment faire comment esquiver les crachats les coups la saleté) (ça ne m’atteint pas – ça ne m’atteint plus) (Mais à qui, Quinn ? A qui tu ferais croire ça ?)
« Ne me lâche pas, ok ? »
Sa main blanche – et bleue, et noire – comme un papillon de vent Les lèvres de Quinn – pétale chutant doucement – ruine infaillible, capitulation imminente Sur les doigts de la poupée
Quinn marche – de tous les côtés, des miroirs aux reflets troubles, tremblants – Quinn est perdu Des centaines des milliers d’images frémissantes – des rides sur la surface de la conscience – les visages de Amélia – et de Lia Des sanglots – des cris – d’une même voix "dégage tu les tueras pas comme... comme... tu sais très bien"
Quinn veut s’enfuir – il ne veut pas – il ne veut plus voir ça Les bras croisés – ses ongles dans la chair de ses biceps Résiste. T’as promis. Résiste. Flots ininterrompus d’images – de blessures C’est Joy ? C’est Johan ? – leurs traits se superposent Douleur – ça fait mal ça fait vraiment mal – Résiste Quinn, résiste Souffle Dissipe l’obscurité sème la souffrance au vent – comme des aigrettes de pissenlits, tout s’envolera Les visages les cris et les larmes – comme une volée de cendres – et le ciel s’obscurcira – les souvenirs voileront la nue ce sera une véritable tempête un typhon un tourbillon Mais sur la destruction le jour se lévera – sur le chaos une aube nouvelle fleurira Alors Quinn - souffle sur ce tourbillon réminiscent – la mémoire s’égrène au vent – les souvenirs sont des pétales tourbillonnants Ils étaient noirs – ils sont devenus blancs Rien n’a changé – mais le jour s’est levé.
Quinn est épuisé – il se laisse retomber – ferme les yeux – la tempête souffle encore – sous ses paupières closes les larmes de Lia Sous ses paupières closes, les sanglots de Amélia.
« Je crois… Que… »
Respire – Johan Amélia Joy Lia – leurs mains sur le torse de Quinn C’est lourd – c’est si lourd à supporter (je résiste car je ne dois pas penser - car je ne dois pas pleurer)
« Si j’ai réussi… Quand tu y penseras… Quand tu penseras à ça, je veux dire, à tout ça – tu – tu n’auras plus mal – ça fera moins mal et peut-être même que – peut-être même que… » (tu seras heureuse)
"Quinn – tu pleures ?" Une autre main – posée sur son épaule Une main gracile – des doigts fins – un visage mutin "Quinn – tu pleures ?" Sourire éphémère Son regard comme une caresse "Tu as bien fait – tu as bien fait et je suis fier-e de toi On n’est pas laid Quinn – et Amélia, j'en suis sûr-e, elle pense la même chose que moi Tu vas résister encore ? Tu me le promets ?" (La morsure de la corde autour de nos deux cous) Quinn cligne des yeux – il n’y a rien, il n’y a plus rien Johan et Lia sont loin – les doigts de Amélia entre les siens – brusque, doux retour à la réalité Est-ce que j’ai rêvé ? Le visage de Amélia tout prêt du sien – c’est bien réel - j’ai eu peur j’ai eu si peur c’est effrayant l’intériorité des gens Les gens sont effrayants Même toi Amélia – toi qui est si jolie et si tendre et si fragile – je crois que – j’ai eu peur de toi Mais j’ai réussi et je crois – je crois que je suis fier de moi Un peu Rien qu’un tout petit peu
« Merci de ne pas avoir lâché ma main. »
Tu m’as guidé jusqu’ici – jusqu’à toi – et je suis content oui je suis content que ce soit toi (et moi) Tous les deux Ici et pas ailleurs. Le jour se lève - l'aube fleurit On a encore survécu un jour.
codage par joy
hrp : je crois qu'il est donc temps de sortir ma musique préférée du monde entier de la galaxie et de l'univers depuis des années : https://www.youtube.com/watch?v=RR_FJ72ddCg Encore désolée pour le retard orz
je ne te lâcherai pas quinn je ne te lâcherai plus non je ne m'en fais pas, peut-être un peu pour toi mais je vide tout je ferme les yeux en hochant de la tête tes lèvres, chaudes qui s'abandonnent sur mes doigts sans lâcher mon poignet (je n'ai pas peur) je n'ai pas peur avec toi quinn car tu concentres tellement d'énergie tellement de volonté à me réparer que je ne peux qu'accepter tout ce que tu me donnes sans rechigner je ne sais pas ce que tu fais exactement comment ça marche ce que tu ressens ce que tu vis mais je sens mon cœur qui se fait moins lourd une rancœur qui s'efface de l'air à la place du liquide qui me noyait je me sens vide i v r e de ce bonheur simple, cette euphorie diluée je prends une grande inspiration et laisse ma main abandonnée dans la tienne un rire un peu idiot s'échappe bien qu'un peu fatiguée à cause de la nuit coulée ou même car je ne sais pas c'est exténuant d'être quiète j'y repense et je ne vois que du clair ; j'y repense et absolument plus de noirceur que de la patience et de la douceur plus de souillure plus que toi et moi et lia, sera-t-elle changée elle aussi plus heureuse moins attristée merci quinn, merci pour tout. je pense que je vais être capable de lui pardonner maintenant. de lui retendre ma main et je pense que lui -enfin je suppose- comme moi on te remerciera assez jamais d'avoir réduit ma douleur à néant. je sais pas exactement ce que je dois faire tout de suite maintenant. je te proposerai bien un câlin mais je veux pas t'écraser. et pour imager mes dires je saisis ton bras et le serre contre moi
hrp: 320 mots // j'ai honte d'écrire ça après ton texte :((
C’est sans doute ainsi que se terminent les histoires – entraînées dans le glissement languissant d’une aube infaillible – dans la fuite temporaire d’une nuit déloyale C’est sans doute ainsi que se terminent les histoires – à l’ombre timidement lumineuse du commencement Je dis au revoir – au revoir aux ténèbres qui se dispersent comme des vieux souvenirs entre les tâches de lumière fleurissant autour de nous sur la pelouse sur nos mains - dans tes yeux – c’est un champ de fleurs nouvelles bien trop resplendissantes - je cligne des yeux presque ébloui - la brise matinale souffle et tous les pétales de soleil frémissent contre mon cœur – et je me dis – même si j’en ai un peu honte – je me dis que le jour, ça n’est pas si mal Ca n’est pas si mal, un ciel sans étoile –
Tu le penses vraiment ? Tu penses vraiment Amélia que tu seras capable de pardonner ? - je ne veux pas connaître la réponse – je sais qu’elle nous blessera tous les deux – la réponse que toi et moi, on connait déjà Et pourtant – pourtant ça ne me déplaît pas de jouer à ça Amélia – tant que c’est avec toi – je veux dire, de faire semblant – car on sait bien tous les deux que c’est juste un jeu innocent – un jeu d’enfant tristes et apeurés perdus dans un monde trop hostile trop effrayant Mais parce que nous nous tenons la main – et que nous sommes ensemble – et que nous jouons ensemble – c’est plus facile de garder les yeux rivés sur cette ligne d’horizon tremblante comme un rêve – cette ligne d’horizon si infime si futile qu’on la croirait irréelle Le bout de la nuit, ça n’est sans doute pas si loin ?... Alors jouons – pour ne pas nous perdre – prétendons que le lever du jour amène l’espoir – prétendons que toutes les fleurs ne se faneront jamais – qu’il y a de la place pour nous sous le soleil – et qu’après l’aurore, on sera plus heureux - parce qu’à force de jouer, peut-être qu’on finira par y croire vraiment, à nos amusements ?
Quinn regarde le visage de Amélia – une dernière fois – pendant que ses traits sont encore sculptés par la nuit – sourire - une dernière fois pour peindre son portrait abîmé par les coups anéanti par les larmes tâché de vie – encore trop tourné vers la mort – pour ne pas oublier la couleur monstrueuse de sa propre rage qui erre toujours sur les joues de cette poupée désarticulée – pour graver en lui l’image de sa propre hideur – de son atrocité épousant abominablement les contours des joues diaphanes d’Amélia, de ses iris sombres aux reflets translucides, du trajet nébuleux de ses larmes Pour ne pas oublier cette nuit
« D’accord … Pour le câlin » et c’est hésitant – parce que Quinn a peur – il a si peur du contact humain – de cette sensation rassurante de cette chaleur qui emporte – son corps est froid depuis si longtemps déjà – c’est hésitant qu’il s’abandonne tout contre Amélia – Amélia, cette poupée humaine, trop humaine – Amélia et toutes ses failles, ses fragilités qui blessent quand on les effleure – et ses mots qui écorchent cruels comme on embrasse avec tendresse – ne pas oublier – sentir – ressentir – le rythme de son corps – le souffle de son existence – la légèreté de sa respiration qui chut dans le cou de Quinn comme une caresse – douceur innocemment blessée contre raideur apeurée - ne pas oublier – Amélia – ne pas oublier –
« Désolée (pour ça, pour moi, pour tout, pour ce que je suis, pour ce que tu as été, pour tout ce que je t’ai fait, pour ce qu’on t’a fait – pour ce qu’on nous a fait) je suis pas doué … Pour ce genre de -- chose. »
Quinn doit tout réapprendre – comment parler – comment câliner - comment aimer - comment vivre. Mais l’effervescente froideur de Amélia est rassurante – sa douceur ne ment pas – son incertitude est sincère – Quinn veut bien s’y perdre – il veut bien pour une fois – être humain
« Amélia (murmurer comme on crie – chacune des lettres de ton prénom comme un retour à la lumière - murmurer et tout dire, enfin) Amélia. Je … C’est… C’est moi qui te remercie… Ce que j’veux dire… Je t’ai fait du mal… J’aurais voulu que ça se passe autrement mais au final – au final – je vais essayer moi aussi enfin… Je vais essayer de pardonner (à qui ? A quoi ?) Pardonner… (Me pardonner moi-même) et – voilà… Je suppose qu’il faut… Qu’on doit… Enfin… »
Quinn se lève – il quitte avec regret la chaleur trouble de Amélia – retour au jour – retour à la poussière.
« Je vais appeler les urgences. Si ça se trouve je – tu – tu as quelque chose de cassé. Tu – prends ma veste. Il fait froid. Je vais attendre avec toi. D’accord ? Ils vont venir vite. J’espère. »
Oui, c’est sans doute ainsi que se terminent les (belles) histoires – en demi-teinte, entre nuit et jour, sur le fil, à la limite, au bord - à l’ombre timidement lumineuse du commencement.
[fin]
codage par joy
hrp:
Merci encore pour ce magnifique rp que je n'oublierai sérieusement pas de sitôt.