Ne. Pas. Frapper.
Ne. Pas. Gueuler.
Ne. Pas. Péter. Un. Plomb.
Surtout pas péter un foutu plomb.

Il était neuf heure trente quatre minutes et vingt six secondes précisément. Et ça, Aaron le savait parce qu'il minutait le temps qu'il avait à attendre dans ce maudit dépotoir qu'était le centre commercial. Aaron n'aimait pas ce endroit rempli d'abrutis. Nooon, tu déconnes. C'était, de un beaucoup trop rempli de gens et de deux, ça sentait littéralement la merde mélangée à de la sueur de gros porc. Pas très invitant, donc.
Ne pas respirer.
Ou presque pas. Juste assez pour ne pas mourir, mais pas assez pour sentir cette odeur fétide qu'il détestait tant. Les gens s'entassaient de plus en plus dans le coin ou Aaron se tenait. L'odeur. Oh, cette odeur. Elle devenait de plus en plus présente, jusqu'à ce qu'il ne puisse plus tenir.
S'en aller.
Vite, le plus vite qu'il le pouvait. N'importe ou mais pas ici. Trouver un coin tranquille. Trouver quelque chose à bouffer. Fallait qu'il fasse quelque chose, n'importe quoi sauf rester planté là le coude touchant celui d'une inconnue. Bon dieu que cette situation le rendait mal à l'aise. De un il touchait à une fille, de deux, la proximité ça n'avait jamais été son truc à Aaron.
Il se mit finalement en marche vers une allée qui lui semblait beaucoup plus calme que le grand hall principal. Oui, là, juste là, c'était bien. Calme. Le silence.
Et une machine distributrice.
Remplie de sacs de skittles. Ah, le miracle ! C'était, pour Aaron, un peu comme un rêve impossible que de trouver des skittles dans un moment comme celui-ci. Juste ce qu'il lui fallait pour se calmer et retrouver un peu de sérénité. C'est bien connu, les skittle ça a des propriétés calmantes. Non? Ah bon.
S'en choper.
Maintenant qu'il les avait repérés et qu'il était tranquille, il ne restait plus qu'à s'en prendre un bon gros sac, s'asseoir sur le  banc juste en face et bouffer les rouges en premier. Aaron fouilla rapidement dans la poche de son jean pour en sortir une pièce de deux dollars. Ça suffirait. Il s'avança vers la fameuse machine et inséra la pièce de monnaie dans la fente prévue à cet effet.
Et la pièce glissa dans la machine.
Mais rien n'en sorti. Aaron se recula de quelques pas pour avoir une bonne vue d'ensemble de la situation. ''Et mes skittles, ils sont ou ? T'as eu ta pièce nan ? Ben donne !'' Une multitude d'idées lui passèrent par la tête alors qu'il laissait s'échapper quelques jurons. Il n'avait jamais été très patient, et ce n'était pas aujourd'hui que ça allait commencer.
Et là, devant lui, l'horreur.
Il vit finalement son sac de skittles coincé au beau milieu de la machine distributrice. Entre les rangées de bonbons et la vitre extérieure. Il était là, pendant, attendant de se faire décoincer. Et décoincer ils seraient.
Aaron s'avança jusqu'à se coller à la machine. Il se mit à genoux, par terre, devant ce gros monstre méchant qui avait gardé sa collation. Il entra finalement une mains dans la fente du bas et étira son bras à son maximum dans la machine distributrice, jusqu'à toucher son sac de skittles coincé. Un sourire victorieux s'était installé tranquillement sur ses lèvres alors qu'il faisait glisser le sac vers le bas.
Mais, parce qu'il y a toujours un mais,
alors qu'il allait glisser son bras hors de la machine ... son bracelet porte bonheur (oh, ironie) resta coincé à une pièce de la troisième étagère, l'empêchant ainsi de sortir sa main, et une bonne partie de son bras de là.
x bordel de merde ...
Encore quelques jurons s'étaient échappés de la commissures de ses lèvres alors qu'il tentait désespérément de se sortir de cette impasse. Il donna de sa main libre de bons coups de poing à la machine, la fit branler dans tous les sens, la bouscula, manqua de la faire tomber sur lui mais rien n'y faisait; il restait coincé là.
Manquait plus que quelqu'un ne se pointe ...