quelque chose en toi s'est brisé à la manière d'un éclat de rire - peu de chance qu'un jour on puisse en recoller tous les morceaux. personne n'en a jamais rien su ; à tous les autres, tu continues d'adresser de jolis sourires et des petits signes de la main - pourtant tu le sens bien, quelque part dans ta poitrine ; un peu comme si le sol se dérobait lentement sous tes pieds.

t'étais de ceux que rien ne semble pouvoir ébranler, pourtant - ta naïveté presque insolente et ta joie de vivre n'avaient jamais manqué d'en agacer plu d'un : tu croyais aux contes de fée aux happy end et puis surtout au prince charmant - t'avais cette fâcheuse tendance à voir le bon côté des choses, tu sais, ces conneries de verre à moitié plein ; t'y croyais dur comme fer, fut un temps. alors tu traversais le temps en semblant en esquiver tous les affres - t'étais pétrie de certitudes à tel point que t'en devenais arrogante ; comme si t'avais besoin d'afficher à la face du monde ce grand sourire qui voulait dire on est heureux. du haut de tes vingt et un printemps, tu ignorais tout de la souffrance ; & naïvement, tu te disais qu'elle n'existait que dans les poèmes .


et puis tu t'étais réveillée une nuit en plein sursaut - le diable au corps et le vague à l'âme. t'avais l'impression que tu venais de caresser l'envers du décor du bout des doigts, d'effleurer quelque chose de bien plus grand l'espace de quelques secondes peut-être ; et puis tu t'étais souvenue des rumeurs qui couraient de toutes ces histoires à dormir debout - tout cela, tu n'y avais jamais cru. et pourtant c'était plus qu'un simple cauchemar, tu le savais ; ça t'avais pris aux tripes comme une vilaine sensation de déjà-vu - et ça avait envoyé valser toutes tes idiotes petites certitudes d'un grand revers de bras.

naïvement, tu t'étais imaginée que ne reviendrait que les doux souvenirs d'enfance  ;  l'odeur des blés fraîchement coupés le chant des cigales et puis les rires des enfants - mais tes réminiscences t'avaient donné des sueurs froides et t'avais fini par ne plus en dormir la nuit. et un beau jour l'évidence t'étais tombée dessus et tout ton joli petit monde s'était effondré avec - sans doute qu'il n'y avait ni contes de fée ni happy end ni prince charmant et puis peut-être bien que tu t'étais trompée sur toute la ligne, esmée ; peut-être que t'avais juste bien trop peur de voir au delà des sourires de convenance & des rires qui sonnent faux.

alors maintenant tu tangues, tu te balances d'un pied sur l'autre - parfois ça te semble évident et puis parfois tu t'y refuses ; parfois tu te raccroches tant bien que mal à tes idées naïves et puis souvent t'aurais bien envie de te mettre des claques. tu divagues tu peines à garder les yeux fermés et puis tu t'épuises - toi même, tu ne sais plus vraiment en quoi tu crois. ça dépend des jours et ça dépend des saisons ; tu te laisses aller à toutes les inconstances.