La joie et l’excitation sur son visage ; Jean se baladait, gambadait joyeusement son portable à la main entre les arbres – il s'enfonçait dans la forêt.
Le soleil avait beau disparaître totalement, son visage restait illuminé par sa bonne humeur (et sa grande naïveté). Car Jean se dirigeait droit dans ces bois, suivant les conseils de Dylan. Ce mec avait beau être de la Team Valor, il restait un ami. Et entre ami, c'est normal de s'entraider pour passer les niveaux et attraper des pokémons.
La vie de dresseur n'est pas toujours évidente, mais Jean possédait une détermination hors du commun lorsqu'il prenait très au sérieux un jeu. Il avait beau être nul (oui même à pokemon go) ; et il avait beau gaspiller ses pokeball au possible, capturer des pokemons incroyablement communs en pensant être un génie ... ça lui rappelait son enfance.
Alors il chantait le générique de l'anime pokémon tout en marchant, histoire d'être dans le mood et aussi de se rassurer légèrement. Car il fallait bien admettre que ces bois, la nuit, étaient carrément flippant.

De toute façon, Jean était assez à fond pour se concentrer sur son écran, relevant la tête une fois de temps en temps histoire de ne pas finir comme ces mecs qui tombent dans des ravins. Il s'enfonçait toujours plus profondément dans la forêt – l'heure tournait – et toujours aucun pokémon à l'horizon... Dylan ne pouvait pas lui avoir menti, c'était surement parce qu'il n'avait pas appliqué ses précieux conseils à fond.
Il quittait l'application, le temps d'ouvrir ses messages et les relisait avec attention.

oh putain il est déjà minuit passé

Et il se déplaçait rapidement à un endroit où le feuillage des arbres ne le gênerait pas pour contempler la pleine lune. Il pivotait sur lui même, baillait et jetait encore un oeil à son dernier message.

Hm hm. - il s'échauffait la voix.Alors... je suis jean neige et je ne sais rien, ô esprits, si vous m'entendez, donnez moi le pouvoir, donnez moi la force, donnez moi les Pokémons, moi, simple esclave de ma bêtise et du génie de Dylan, amen !

Il laissait passer les secondes. Rien ne se produisait alors il regardait son portable d'un oeil plus perplexe encore.

Cette phrase était chelou en y repensant...

Mais il n'avait pas trop le temps de penser, jean. Instinctivement, il se déplaçait de quelques mètres et, JOIE – ô joie. Son portable vibrait, ce n'était pas un message.
Un pokémon non loin de lui, après tant de marche.
Il lançait la procédure habituelle de capture, MAIS MIRACLE. Un pokemon jamais vu au paravent ! Un beau mélofée qui lui faisait de l'oeil.
Après multiple essais (du à sa nullité) il l'attrapait. La satisfaction parcourais son corps entier. Mais une fois la joie passée, il entrait en réflexion à nouveau.
Est-ce que ça valait vraiment le coup de venir là à minuit et de prononcer bien haut cette phrase étrange au milieu de nulle par pour UN mélofée...?
Ouais.
Alors il repartait, satisfait. Revenant sur ses pas.
Ses yeux n'étaient plus scotchés à son téléphone et de ce fait, il admirait enfin le paysage... Les ombres, les feuilles qui bougeaient... tout était sombre. Et la route lui paraissait vraiment longue. Plus longue qu'à l'allée bizarrement.
Illusion d'optique probablement, comme ces ombres qui ressemblent à des gens ou ces sifflement qui donnaient la terrible impression qu'il n'était pas seul. Il tremblait.

Après plusieurs mètres parcourus sans entrevoir la sortie, il pouvait s'affirmer perdu. Il en avait le coeur net cette fois, et il jetait un regard un peu paniqué à son portable. Par réflexe, il prenait la dernière personne à qui il avait parlé par sms ; Dylan.
Il écrivait dans la foulée, quelques sms de détresse puis,
plus rien.
Noir complet.
Son écran était éteint.
Il faut dire que l'appli' pokemon go épuise très rapidement la batterie.

Alors il soupirait - reprenait sa route, espérant que son sens de l'orientation ne lui ferait pas défaut plus longtemps.

Je laissais ma tête retomber sur le volant de la voiture dans un bruit sourd alors que mon portable vibrait une énième fois sur le siège passager pour indiquer un nouveau message dont je devinais la provenance.

Perdu. Forêt. Pokémon. Batterie vide.

Je me redressais pour laisser échapper un soupire à en faire pleurer un ange et toute sa descendance si c'était un temps soit peu possible, même si, actuellement, c'était moi qui chialait de désespoir pour ce gosse beaucoup trop con pour le commun des mortels. Il devait avoir fait quelque chose d'horrible dans une vie antérieur pour arriver à un tel niveau de débilité qui frôlait le ridicule - qui lui rentrait en pleine gueule, ouais. Genre tuer des bébés chats ou manger des termites encore vivants.

Démarrant la voiture, je me mis en route pour rejoindre la forêt avec en tête un sauvetage des familles pour ce pauvre enfant alors que je l'imaginais déjà pleurant sur son sort et se pissant dessus pour se réchauffer un temps soit peu à cette heure de la nuit tout en mangeant des champignons toxiques pour s’alimenter en s'imaginant déjà mourant de faim, de soif et de froid.

Alors okay, c'était peut-être pas sympa de lui envoyer des conneries par sms en plein cours, simplement par ennuie mais me réveiller à minuit parce que ce crétin à suivit A LA LETTRE mes messages alors que je me foutais pourtant CLAIREMENT de sa tronche. C'était se foutre - et pour le coup oui - de la gueule du monde.

bordel de merde.

Alors oui, je prenais la route pour sauver ses petites miches et non, je le laissait pas dans la pire des merdes parce que. Bah, parce que. Jean Neige, il est peut-être très chiant. Chiant. Vraiment très chiant. Je suis pas un salaud au point de le laisser en pleine forêt et, par-je-ne-sais-quel-moyen, en partie par ma faute - mais surtout et avant tout parce que c'est abruti.

C'est ainsi que je me retrouvais au bord de la route, à me les cailler sévère alors que j'y voyais foutrement rien et que l'envie d'entrer dans cette foutu forêt n'était pas à son maximum.

JEAN NEIGE ?! T'ES LA TROU DU CUL ???

Sauf que bah non, il était pas là.

putain.

M'armant de mon téléphone en mode lampe torche, une main dans les poches tout en remontant les épaules à cause du froid, je m'avançais dans les herbes hautes avant de m'éloigner des lumières de la voiture pour finir engloutit par les arbres qui m'entourait.

J'avais pour habitude de venir ici étant plus jeune, de jour, de nuit ou de pluie, à la recherche de cadavre ou d'escapade nocturne avec mes amis, alors y revenir pour retrouver un petit crétin de la team Instinct ça ne m'effrayait pas plus que ça.

JEAN NEIGE ? JEAN NEIGE ???

Marchant sans vraiment faire attention, je le cherchais du regard tout en gueulant son prénom à plein poumon avant d'entendre un craquement sur ma droite, faisant pivoter ma tête dans cette direction à sa recherche.

Jean Neige ? C'est toi ?

Il y avait bel et bien une silhouette mais totalement étrangère à mon ami, bien plus grande, plus fine, plus assuré et imposante qui semblait s'avancer vers moi avec une détermination qui me troubla avant de me rappeler des paroles de Vito après sa dernière expédition en forêt.

je te jure mec... on étaient poursuivit, Théo et moi, on a trouvé un putain de cadavre. Un cadavre !

Un cadavre.

Déglutissant, je m'agitais comme un forcené avant de me lancer dans la direction opposée, courant à perdre haleine sans vraiment faire attention à où j'allais avant de me prendre un obstacle en pleine poire au point de me ramasser parterre, m'agitant une deuxième fois pour me redresser au plus vite.

Noir complet. Ses yeux s’y habituent cela dit, une chance qu’il arrive à avancer sans se prendre la première branche en pleine face.
Une chance d’être venu ici aussi con et insouciant,
une chance que Dylan ait reçu ses messages avant que le noir total ne tombe…
une chance (peut être)
il est plutôt incertain.
Il se dit qu’il pourra sortir d’ici avant même que Dylan n’arrive, il est terriblement optimiste.
Cela dit, il arrive à se montrer réaliste après plusieurs kilomètres perdus à errer, tourner (dans le vide) ; le tout pour se perdre encore plus.
Un génie Jean, quand il s’y met.
Il bâille (encore) ; regarde son poignet pendant une bonne minute avant de se rendre compte qu’il n’a jamais eu de montre. Il se fait tard. La fatigue prend possession de son corps et l’oblige à s’arrêter.

Sous un arbre ; il prend une pose. Son dos s’appuie contre son tronc, puis le poid de son corps subit la gravité qui l'entraîne vers le sol légèrement mouillé ; assis au milieu des bois. Il pourrait passer la nuit là (si il ne faisait pas aussi froid).
Les minutes passent et
non. Il ne peut pas dormir,
pas ici, pas maintenant.
Il veut reprendre sa route, mais par où aller ? Son sens de l’orientation laisse vraiment à désirer. Il ferme les yeux - ses oreilles font le reste : filtrent les bruits, bruits qu’il s’efforce d’ignorer avant de commencer à réellement flipper. Il entend quelque chose se rapprocher.
Sans se retourner, à tout hasard, il hausse la voix.

Dylan ?

Pas de réponse. Sans doute une hallucination auditive (ou une connerie dans le genre)
et pourtant, ça se rapproche - et ce n’est pas qu’une impression.


...Me fais pas le coup du devine qui c’est steuplais je déteste ça.

Toujours rien.
Mais merde, il est trop optimiste.
Ou pas assez réactif, au choix.

Y a quelqu’un……?


Plus le temps de se poser des questions.
Il se relève, marche (aussi vite qu'il peut)
puis il court.
Car il agit seulement une fois qu'on le presse
(il stresse)
(peut être pour rien)
il est incertain.