Kye adorait particulièrement l'hiver. Cette saison où il pouvait se couvrir d'une dizaine de couche d'habits, mettre les pulls de sa grand-mère, se réchauffer les doigts autour de son mug de café et surtout, les donuts étaient en édition limitée aux goûts potiron, canne de Noël ou encore cannelle. Rien que d'y penser, il en avait le feu aux joues. Ce qui lui manquait malheureusement, c'était la neige. Même si contrairement à beaucoup, ça ne l'empêchait pas d'aller au boulot (Foxglove Valley a toujours besoin de sa police) il adorait aller s'amuser avec son chien, Tiki dans la neige, et voir les enfants s'amuser dans les rues en profitant que l'école soit fermée. Seul point négatif était certainement les gens qui se bornaient à prendre la route malgré tout pour finir au téléphone avec la police en pleurant de les sortir du fossé. Oui. Et encore, ça avait presque pris une tournure drôle finalement donc ce n'était pas si horrible que ça.

Et ce matin, comme tous les matins, il s'était levé tôt, lavé et chaudement habillé avant de partir, pressé par son animal qui ne cessait de tirer sur la laisse. C'est alors avec un donut entre les dents qu'il partit en trombe. Même pas le temps de prendre un café. M'enfin. Pas grave, il demandera à son stagiaire de lui en faire un.

Il prit la voiture et pour une fois emmena son gros berger allemand à un parc différent. Il pensa immédiatement à Carmela. Peut-être pourrait-il la prévenir par sms pour qu'ils promènent, là-bas, tous les deux, leurs chiens?Il voyait ça aussi comme une bonne opportunité de bien commencer sa journée. Parler avec le mexicaine de banalités, l'aidait sans aucun doute à se vider son esprit un poil trop perturbé et puis elle était d'une très bonne compagnie. Peut-être pourrait-elle lui donner son avis sur les nouvelles friandises pour chien goût....qu'est-ce déjà?Ah oui, goût cheddar. Les chiens n'étaient-ils pas censé être des carnivores, non maintenant ils étaient devenus des fins gourmets français. Il ne put s'empêcher de lâcher un petit rire amusé alors qu'il se gara près du parc et en profita, à contact éteint pour caresser la tête du canidé. Il se regarda une dernière fois dans le miroir pour retirer les miettes qui avaient pu rester autour de sa bouche après avoir entamé sa pâtisserie avant de sortir en tenant Tiki par sa laisse. Alors qu'il se mit à marcher, l'herbe gêlée craquant sous ses pied, le regard rivé sur son portable devant son dernier échange de sms avec Carmela, il entendit bien assez rapidement des aboiements bien familiers.

Sa curiosité étant été piquée à vif, il s'empressa de relever ses yeux amandes vers les silhouettes au loin. Il esquissa un sourire satisfait en identifiant leur identité sans le moindre problème. La probabilité était faible et pourtant les dieux avaient décidés qu'ils se rencontrent sans même leur intervention. Sa journée ne pouvait qu'être bonne. Mais visiblement, elle, ne l'avait pas remarqué. Il allait lui faire la surprise si ce n'était lui en faire la farce. C'est donc à pas de loups qu'il s'approcha d'elle, suivi de son chien qui resta lui-même silencieux. Alors qu'il se trouvait à peine trois pas d'elle, il lui envoya un message:

8:07 - Derrière toi.

Le sms envoyé il lâcha son chien pour qu'il aille s'amuser avec ceux de la latina, et s'accroupit pour s'asseoir à côté d'elle, se laissa un peu tomber au sol. Il tourna la tête pour la détailler, souriant, un peu charmeur malgré lui. Il espérait de tout cœur que l'effet de surprise soit réussi.

-"Bouh."

La réaction de Carmela ne l'avait qu'à moitié impressionné. Après tout il avait fait exprès de la surprendre ainsi, pour le simple fait d'avoir le plaisir de lui faire quoi. Quoi sadique, lui? A peine, c'était juste qu'un grand gamin encore. Prêt à faire de farces et s'excuser du beau sourire que lui avait offert Dame Nature. Et ceux dans n'importe quelle situation. C'était toujours comme ça que ça marchait et lui-même ne pouvait désormais le nier. Décidément la beauté aidait aussi à calmer les esprits et à se faire plus rassurant.

"Madame qui murmure à l'oreille des chiens." lui répondit-il comme pour l'imiter, en affichant toujours ce petit sourire de couverture qu'il abordait tant.

"Et bien pour tout t'avouer, je ne savais pas que tu allais également être ici!Tu sais je me suis réveillé tôt ce matin et je me suis dit que ce parc était pas plus mal non plus pour Tiki alors j'ai décidé d'y faire un tour et je vois que toi aussi-" Il termina sa phrase par un petit rire, comme pour d'étendre l'atmosphère.

"Ça fait du bien un endroit calme sachant la grosse journée qui m'attend. Mais je suis content, j'ai Molly pour le week-end ce soir. Ça te dérangerait qu'on vienne te voir?Elle adore les animaux." Comparé d'habitude, il avait l'air réellement heureux et pas juste pour se donner une apparence. Après tout, sa fille était bien l'une des seules choses qui ne lui apportait que du bonheur. Une petite fille, si innocente, pleine d'amour pour son père. Si il avait pu lui offrir le confort d'avoir un papa et une maman encore réunis, il l'aurait fait mais Grace ne l'aimait plus. Il avait fini par s'y faire avec le temps mais le sujet était encore douloureux et difficilement abordable sans qu'il ne veuille changer de sujet. Mais il savait que Carmela n'aurait pas le culot de lui demander puisque de toute manière, ils n'abordaient jamais de sujet très sérieux. Toujours dans la plus grande des innocences. Et comme si cela ne suffisait pas il lui adressa un clin d’œil en rajoutant:

"Si tu veux je préparerai des gâteaux bien de chez moi pour te remercier."

"Pourquoi pas." le premier bruissement ne l’inquiéta pas, pris dans l'euphorie d'une conversation bien naïve. "Chez moi ou chez toi?" Accompagné d'une courtoisie sans nom. Échange de bons procédés, si sincères, à en douter.

C'est des sourires qui se lancent, des sourires qui se balancent et se renvoient entre deux réincarnés. Parmi les chiens et les aboiements, Kye s'en sentirait comme à la maison, si seulement il n'y avait pas eu ses bruissements inquiétants. Les chiens s'étaient arrêtés et sa concentration s'était envolée. Il fronça les sourcils, n'écoutant plus Carmela. Ce n'était plus le gentil policier mais un policier sur la défensive, aussi sérieux ici que sur le terrain.

Levant la main, lui faisant signe de se taire, il se redressa. "Je crois qu'il y a quelque chose. Carmela, appelle tes chiens." Beau chevalier protégeant sa dame, c'est empli d'un courage que lui-même n'aurait su nommer qu'il s'avança vers l'origine du bruit. Main sur son arme, le cœur battant à la chamade, il se sentait prêt à tout affronter, seulement pour protéger, beau héros trop parfait.