Vito n’était pas habitué à être nerveux.
Ce n’était pas de l’anxiété, mais un étrange mélange d’appréhension, de joie et d’excitation. Un poids dans le ventre pas exactement désagréable mais dont l’on se passerait bien. Des mains dont on ne sait pas vraiment quoi faire, des pieds qui ne tiennent pas en place.
Il ne pouvait pas rester assit plus de trente secondes, et pour Vito, c’était absolument anormal.
C’est à dire qu’il n’avait pas revu Silvan depuis des années.
Faux. Il l’avait revu quelques jours plus tôt. Au boulot.
Lui, caissier et Silvan, danseur de ballet mondialement connu.
Ex-danseur, visiblement.
Cela faisait des années qu’ils n’avaient pas eu une vraie discussion, et il était temps de remédier ça - car Silvan était de retour dans la fameuse Mystery Valley, et ils avaient une tonne de choses à se dire.
Ils avaient gardé contact, en quelque sorte, avec les moyens du bord. Instagram, Twitter, Facebook personnel. Vito l’avait vu à la télé, aussi, mais surtout dans son fil d’actualité. Ils s’étaient fêtés bon anniversaire sur messenger, Joyeux Noël, bonne année, happy thanksgiving, bravo pour ton dernier prix. Des nouvelles, de temps à autres, inopinément. Mais ça n’avait pas été vraiment plus que ça.
les réseaux sociaux étaient impersonnels comme ça.
Loin des yeux, c’était difficile de rester près du cœur.
Mais Silvan était de retour. Vito se sentait un peu mal de se réjouir.
« Tu t’es coupé les cheveux, » était l’une des premières choses que Vito avait trouvé à dire lorsqu’il s’étaient revus à la station. Il les avait connus longs - à l'époque où Vito était un gamin puis un ado un peu paumé comme il y en avait des millions. Face à Silvan, il n’en avait jamais vraiment mené large, mais ce n’était pas grave. C’était un type plutôt impressionnant.
Vito avait eu le temps de voir le soleil se coucher derrière la fenêtre du salon (salon qu’il avait rangé trois fois). Méli était probablement dans sa chambre, Dylan n’était pas là. Et Vito faisait les cent pas.
La nervosité ne lui allait pas vraiment bien.
Ce n’était que Silvan et un marathon Evangelion en perspective. Rien qui ne puisse mal tourner.
Il était dans la cuisine quand la sonnette retentit enfin.
Heureusement, il n’eut pas à forcer son sourire en ouvrant la porte, découvrant le danseur. Agité, oui, mais aussi heureux de revoir un ami de longue date.
« Hey ! »
Il avait un bon timing. Il venait de mettre de l’eau à chauffer.
Dans une joyeuse invitation silencieuse, il ouvrit complètement la porte pour le laisser passer, le bras légèrement ouvert.
« Fais comme chez toi. J’ai fait du thé, t’en veux ? Sinon j’ai du café. »
Et puis-
« Oh et salut toi ! »
Le chien. Immédiatement, Vito se baissa pour lui caresser la tête affectueusement.
(S’ils savaient.)
