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(fb) le parfum / avray
Avril
 
magnolia
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Avril
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Sam 30 Déc 2017 - 23:03

le parfum

on lui avait arraché sa couronne à l'affront de sa superbe - un murmure fou de savoir lui était parvenu, en provenance des abysses, comme quoi les fleurs sauraient parler. les magnolias seraient enfin éclos.

avril l'avait appris comme ça, avec la rumeur qui se veut toujours rapide. c'est un mal familier et toujours efficace sur elle ; dissumuler ses racines à la foule inquisitrice, qui veut tout connaître maintenant, qui la bat innocemment du fer des "on dit que". elle est paranoïaque, elle a juré voir des fleurs sur sa peau. ça remonte à trop loin pour être précis. une ancienne damoclès qui menace de trancher ses pétales : un amour vrai comme la jeunesse.

ce matin encore, elle avait dit bonjour tristesse, je ne t'avais pas revu depuis dix minutes. sa psyché devient noire à force de se débattre ; comme ces cernes et l'air apathique qui la suivent jusque dans l'appartement de ray. nous sommes en mars alors avril se sait sans valeur, pas plus que d'habitude, on fera mieux la prochaine fois : monstre pathétique mais jamais larmoyant. elle a toujours préféré la colérique amertume des plus profondes détresses - à la libération labiale qui se veut dramatique.

cela faisait deux jours et elle n'avait toujours pas compris quoi faire de cette vieille chimère qui s'était réveillée dans sa poitrine. elle revenait de droit à ray ; pour une fois, elle irait lui offrir une fleur.

salut. elle arrivait toujours comme ça, annoncée par un simple message sur le répondeur, par un effet dont elle était la cause. et si elle était la cause - elle n'était sûrement pas la bonne.

sa voix traînait et était trop faible pour porter son habituel et lourd manteau de joie. avril n'a pas un regard, ses yeux désormais n'appartiennent qu'aux limbes ; et aux temps révolus de ses malheurs. t'as entendu la rumeur en ville ?

elle s'approprie tout naturellement l'espace en commençant par le canapé. elle n'a pas envie de demander si ça va, puisqu'elle sait que ça lui donnerait tort. elle préfère couper la politesse en deux - c'est une hydre qu'elle se plait toujours autant à combattre. son regard ne croise jamais le sien car embué d'une honte qu'il pourrait vite comprendre. pourtant, le dénouement est naturel, il ne tient qu'à un flagrant détail :
avril portait toujours ce même parfum de magnolia.
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Mer 3 Jan 2018 - 20:03

Quel oiseau a-t-on fait filer à son front sans nature, Ray écoute un vent de maigre soleil lui parler des jours nouveaux : son ventre est malade d'un autre miroir. Des noirceurs se retourner dans la noirceur, et savourer sur ses dents de hargne les derniers parfums de ses jours, avant qu'un néant amer ne le recouvre, ne lui rappelle que les plaies béantes seront toujours rouges. Le chewing-gum claque à ses lèvres, et du coin de l'œil, il cueille un liseré de printemps, une toute petite île de douceur dans des remous salins qui lui font encore détester le jour. Ray se languit de l'été, mais au moins, au bout de tous les hivers : il y a Avril. ‹ Salut › qu'il lâche comme on se jette aux champs.

Mais qu'est-ce que la rumeur des villes : ça lui court partout autour de la tête comme des chenilles de péché. Des pattes chatouillent ses oreilles et sa nuque toute la nuit pour lui parler de ses fautes. Une paresse de l'herbe dresse un peu ses cervicales, hors de l'abri de ses bras repliés ; il perche son menton à l'affront de la fenêtre ouverte. Un rayon de fatigue s'illumine au prisme de son visage de vingt ans, pour demander au matin s'il n'est pas trop jeune pour mourir. ‹ Quoi, les protecteurs des réincarnés ? C'est ça que tu dis ? › Des protecteurs aux bras trop courts pour atteindre le citronnier où il s'est oublié, la bouche pleine de terre, le ventre plein de néon ? C'est de ça que l'on parle, en presque avril ? Le confort des ignorances un peu menties, c'est le langage du printemps ? Que l'on mette Ray au parfum : il tranche l'abysse où il est d'un soupir. ‹ C'est de la connerie non ? Ça se saurait › s'il y avait autre chose que des douleurs venimeuses pour siffler à son esprit (mais moi je sais mais moi je sais) ‹ si quelqu'un veillait dans l'ombre. ›

Ray déplie douloureusement sa figure sans lumière, pour révéler une plaie de lassitude sur sa poitrine, et faire un pas vers la kitchenette. Il y a des nuances de noir qu'il ne veut pas faire voir à Avril ; il veut préserver à son col, cette ignorance arrogante et juvénile, qui fait rosir ses joues et crier ses mains, et qui n'a pas peur de la nuit. ‹ Tu veux un truc ? J'vais me faire un café, j'ai pas dormi de la nuit. › Comme s'il n'était pas déjà trahi par le terne de ses éclats, Ray ne sait plus dans quel tiroir il a rangé sa superbe ; les feux dans les yeux d'Avril sont toujours des mensonges. Alors : qu'est-ce que la rumeur des villes, si aucune racine n'a poussé pour lui.

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Jeu 4 Jan 2018 - 14:32

le parfum

lequel d'entre vous est le plus malade - les moires ternies murmurent toujours le prénom de ray. lequel d'entre vous a mal - il n'y a plus personne pour venir veiller sur le front tempéré d'avril. par conséquent, et comme le veut la sylve d'omniscience, il revient toujours aux renaissants d'être l'apanage de la douleur : on lui a appris que les fleurs ne savaient pas pleurer.

ouais... ouais, c'est n'imp. elle n'a pas prévu d'armure contre les mots faussement tranquilles de ray - tout est inutile. il est plus désabusé qu'elle à l'ombre des saules sciés, à vif comme les chairs du printemps. ses mains passent sur ses côtes pour en récolter la chaleur torpide et qui n'a rien d'agréable. plus rien ne trouve grâce aux yeux d'avril ; d'autre que son confort à lui.  non... non en fait c'est pas n'imp.

sa poitrine vibre au rythme térébrant qui ne sait pas ce qu'il dit, ce qu'elle dit - que dis-tu avril, à confirmer le murmure affreux de la ville ? qui ne sait rien si ce n'est que tout est faux. que fais-tu à limer toi-même ta carapace de verre, qui reflète toutes les nuances de tes parjures innocents. pourquoi te plantes-tu ce couteau ; il te reste deux cent vingt-cinq ans à vivre.

ray euh, elle reste simple dans ses drames personnels. putain je sais pas quoi dire... son ventre se tord, prêt à dégobiller toutes ses vérités infâmes et qui n'ont pas lieu d'être ici. tout son corps frelaté se courbe sur les souvenirs de la jeunesse, quand elle plante ses doigts dans ses cheveux.  elle n'a pas bougé, elle ne peut pas. elle souhaite simplement, ray ; que vous soyez toujours amis.

en fait j'en suis une.

tout est dit un peu facilement au final. en fait j'en suis une, et puis voilà, c'est pas très grave ? puisque je ne fais que confirmer la rumeur des villes. te voilà au parfum - une eau florale qui connaît les peines ardentes de ton ventre inversé.

je veux bien un coca, elle souffle en riant plus jaune que les jacinthes,  triviale entre ses dents rosées. c'est là toute sa pudeur ; irritante et stupide.
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Lun 15 Jan 2018 - 19:16

Sur les lèvres de psaume d'Avril se répand un « crac », des promesses brisées dans le silence. Crac : une membrane de pierre s'ouvre en deux sur une jeunesse volée, et dévoile un sanctuaire. Alors c'est ainsi, il court dans les cheveux d'Avril un empressement messiaque, sous ses ongles mous d'enfant se cachent des vœux virginaux. Alors c'est ainsi : elle en est une. Une fleur de bord de route, assoiffée d'ombre, qui échoue par sa fenêtre. Avril a pour elle ses bontés menties sur son sein, et dans les lézardes de leur silence, le regard se pétrifie.
Dans la tête de Ray aussi, ça fait crac.

‹ C'est une blague ? ›

Car si c'est le cas, elle n'est pas très drôle : d'ailleurs il a oublié de rire, haha, haha, c'est bien ça n'est-ce pas ? Avril, tes farces sont devenues malines, elles font semblant de faire mal. Il faut en sourire pour ne pas y croire, enfin, n'est-ce pas insensé : c'est toi pourtant, qui doit être toujours voilée de ta grande raison sous tes semelles de verve. Il lui tend le verre de coca, c'est toujours une amie non, c'est bien là le geste qui convient pour les gens qui n'ont jamais fait mal, jamais au noyau dur de tout ce qui est encore un petit peu vrai dans la tempête : ‹ Parce que sinon, enfin, ça voudrait dire que tout ce temps t'aurais su... › ... pour le mal de chien que ça fait, s'éveiller à l'aube avec la nuque humide des lames en menace, et jurer entre les dents que son nom n'a jamais été percé : comment pourrais-tu savoir, Avril, les démons ordinaires qui rongent les estomacs des enfants ? ‹ ... et que tu me l'aurais pas dit ? › Une dizaine d'années que Ray connaît ton nuage de regard, et tu ne l'aurais pas fait - il connaît toutes les fleurs dans ton estomac. Comment aurais-tu pu lui en cacher une ? Tu les lui as toutes montrées non : ton bouquet, il le connaît par cœur.
Son sourire se sclérose comme ses doigts autour du verre.

‹ Et tu ferais pas ça, hein Avril ? ›

Toi Avril, les mensonges qui fleurent dans la nuque de tout le monde, n'est-ce pas vrai que tu ne les connais pas -
sinon, qui d'autre dans cet enfer
n'aurait pas ce parfum ?

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Jeu 1 Fév 2018 - 23:51

le parfum

voilà toutes ses petites douleurs prévernales - elle ne te supplie pas d'arrêter de rouvrir ses plaies de printemps, toute savante de la satisfaction qui consiste à comparer les malheurs entre eux - mais avril, à ce jeu-là, tu as déjà perdu.

ce n'est ni une blague ni un plaisir, alors qu'est-ce que c'est ? qu'est-ce que c'est avril, cette épine sérotinale plantée dans ton cœur exsangue, rempli d'ecchymoses douces qui ne sont plus qu'un miroir. qu'est-ce que c'est avril, qui empêchera ray de tomber.

ben, BEN SI et ça crie toujours à l'orée des tornades, ça ne connaît que les paroles crues qui ne savent pas bien formuler - je t'aime, alors ne me laisse pas. ça souffle un peu tout d'une colère habituelle, c'est une langue vivante dans sa verve vineuse. d'un coup elle se relève ; sans frapper. c'est pas encore le premier avril hein, je vais pas venir genre le matin tranquillou pour te dire ça genre "lol toute ma vie est un silence" et puis après te dire que c'était une blague ? je suis plus drôle que ça j'espère je- putain mais t'es CON putain ouvre les yeux.

mais ils sont déjà grands ouverts sur ton bouquet d'efflorescence neuve, toujours sanguine, pas vraiment changée au final ; c'est ça ! avril n'a jamais changé, voilà ce que disent ses mots sauvages et primitifs comme l'adolescence qui ne sait pas murmurer. elle veut juste que tu saches ça, qu'elle t'aimera toujours avec la même ardeur qu'il y a dix ans. la preuve que si... mais je pouvais rien te dire ray je- putain ça me saoule et ne voulant rien casser, elle ne fait que boire son verre - sans trinquer.

on pouvait rien dire avant, on avait pas le droit tu vois et- de toute ça aurait rien changé au fait que tu te serais souvenu tu sais ? je sais même pas qui tu étais, je connais rien, ça aurait juste était ultra chelou que je te dise que je le savais. et franchement,
elle rit plus jaune encore
je suis clairement pas une épaule sur laquelle pleurer. mais alors avril, pourquoi ne pleures-tu pas.
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Ven 2 Fév 2018 - 5:52

Que c'est drôle : cette avanie venue des âges qui n'est pas une blague. Qui n'est même pas la drôlerie d'une fable mal armée, non, c'est une bien réelle ortie d'humiliation, ça ne le fait pas rire : en fait, ça ne fait rien du tout. Des avalanches du frimaire ont été précipitées sur les épaules de Ray ; ça le gèle gentiment jusqu'au bout de ses flammèches d'ardeur, alors il n'a plus rien : il n'y a que le chewing-gum qui claque sur sa langue.

‹ Ben casse-toi de chez moi alors. ›

Ben oui, Avril : qui es-tu maintenant ? Il voit juste un arbre mal taillé qui fleurit d'inconnu, il ne fallait pas lui précipiter un hiver si tu voulais éclore. Il mâche juste, debout, tranquille, son iris poinçonne le calme de vieux rires filigranés. Ah toute ta vie est un silence ! Mais la sienne se compte en années de vacarme maintenant. Une cacophonie bien verte où l'on joue en arpège des erreurs délicates, avec quelques fois cette chorale un peu vilaine : il ne manquait plus que toi pour le précipiter sur un sol majeur. Avril, si tu savais un petit peu les lire, tu saurais que sur toutes les partitions même les silences sont complices.

Des poings vides cherchent un récif dans les poches de sa veste. Ray a des cendres en forme de nonchalance et un néant mal amusé en travers de la poitrine. ‹ Je sais pas s'il y a d'autres trucs que t'as "pas le droit de me dire", et de toute façon je crois que j'ai pas envie de les savoir, donc... › Son regard suit ostensiblement le petit chemin du canapé à la porte, pour tracer la jolie sortie de sa vie : elle est décorée en parements de déception. ‹ Ne te fatigue pas plus que ça, et puis dégage. › Alors dehors, charmante inconnue ! Là-bas ça empeste la tromperie rose, ça devrait t'être familier. Un rire jaune trahison éclot brièvement à ses lèvres pleines de feu, il ne peut pas s'en empêcher : Ray préfère toujours dorer ses plaies. Il boit sur son cœur en nudité honteuse ce dernier poison, de toute façon : il en connaît déjà la saveur. On a coupé les gerbes sûrs de ses mains, ni épaule ni amie alors hein ? Sur ton passage Avril, tu ne laisses que des terres brûlées. Il insiste, il faut partir pour qu'il fasse de ce domaine de merde un bon bosquet où mourir. Ray dépouillé une dernière fois de ses certitudes, n'a plus qu'une tiède apathie pour sa blessure : il paraît que celleux à qui il les montre finissent par s'en moquer. ‹ De toute façon je vois pas ce que ça peut te foutre, t'as l'air d'avoir mieux à faire. › Vous en avez sûrement des dizaines d'autres à décevoir mademoiselle : mais peut-être pas autant à faire si bien saigner.


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Ven 2 Fév 2018 - 22:17

le parfum

ni épaule ni amie - elle n'est qu'une hespéride de trahison maintenant que les fleurs ont éclos. depuis qu'elle a la vérité en travers de la bouche, comme une épée de justice qui lui intime en hurlant : va donc, fier spectre des jardins secrets, lui conter de ta grande voix comme tu as faussé ses louanges toutes ces années. elle se complait dans sa propre colère - en a fait un ravissant manteau, un peu rapiécé de larmes mais toujours bien coupé, taillé de ses mots roses. elle ne pensait pas qu'on menacerait sa gorge si rapidement. car oui c'est l'étrangler que de lui dire ; va-t-en, ici ce n'est plus chez toi.

non ! on a tranché la peine en deux pour lui enfiler une peau d'offense, d'une voix ferreuse qui refuse d'abandonner. ça dégouline de rouge frais et de bleus chauds. elle voit un peu flou ; ses yeux fixent la naissance de son col, ou bien est-ce le chewing-gum. je vais pas me barrer je- désolée mais- tu sais bien que ce n'est pas mon genre comme ce jour où je suis restée toute l'après-midi chez toi pour que tu me prêtes ta console alors que je devais partir à dix heures maximum et j'ai bien dit maximum ah- elle rit du temps passé. putain ray, j'ai rien de mieux à faire.

ce n'est pas pour dire qu'elle est triste de ne pas avoir autre chose à faire - de mieux que de compter les oripeaux dans ton ventre de plein ciel. c'est juste pour dire - que tu es ce qu'il y a de mieux en avril, et que dans ce pot-pourri de monde, elle voudrait des amis chers pour accepter sa parjure de plein fouet.

mais maintenant qu'elle y pense ah- c'est malsain pour une fleur d'être aussi égoïste, l'a-t-on arrosé d'une eau mauvaise ou s'est-elle infligée elle-même ce poison : elle ne trouve pas de nom à ses malheurs, alors ses yeux fous d'excès viennent le chercher dans l'éclat du verre
brisé d'un coup sur le sol.

..pardon. ça vaut un peu pour tout, cette onde calme et passionnelle qui dit sincèrement - pardon. mais j'aurai jamais mieux à faire que toi si t'es dans cet état. alors -ça lui arrache la bouche mais c'est une douleur bien minimale par rapport à la sienne- .. désolée mais je partirai pas avant d'être sûre que ça va entre toi et moi.
avant d'avoir passé ma paume sur les blessures que j'ai causé.

elle jette un coup d'œil au sol maculé ; puis suit le chemin des pélerines jusqu'au visage rincé de ray, ça lui arrache un rire, pour faire comme avant.

bon ok ça c'était con.
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Sam 3 Fév 2018 - 5:26

Mais il n'y a pas de pardon à accorder dans ses mains vespérales, Ray battu au crépuscule se tait sur les infinis de colère qui se jettent aux quatre vents. Il n'a pas eu le moindre soubresaut au verre brisé : quelque chose d'autre qui s'est cassé accapare le délitement de son attention. Mais non, il n'y a pas de pardon au bord de la nuit : ne voyez-vous pas comme sa nuque ploie déjà à la lumière, sans laurier et sans la superbe des beaux jours, voilà tout ce qu'il reste des démiurges lycéens. Il y a longtemps que le luxe de sa nitescence s'est couché à son horizon, quelque part sur sa fêlure elle s'est éteinte.

Il voudrait sourire de cette bonne vieille carcasse diaphane, toujours tordue de rires charmants mais où les cascades sonnent creuses, si seulement ce n'était pas la sienne. Donc, donc, voilà : c'est fini la jeunesse. On ne joue plus avec cette enfant hommasse, et les fleurs se dénudent en épines. ‹ C'est trop tard. › Il n'a pas le fatalisme à la bouche, Ray n'est pas de ces gens-là. Ses sourcils se haussent comme on parle du temps qu'il fait, depuis longtemps c'est qu'il fait gris à son sommet. Une épée émoussée à ses yeux s'inscrit dans le regard d'Avril, à défaut de s'y planter : elle laisse une griffure et disparaît sous un battement tranquille de paupière. ‹ Je vais pas te pardonner pour te faire plaisir. › Non, non, et ce n'est même pas par méchanceté, vois-tu ayant toujours été simplet Ray n'a jamais joué à ce petit jeu. Mais il est très naturel aujourd'hui sur sa bouche, ça ne pique pas d'être mesquin et ça ne gêne plus de miroiter ses viscères noires du bout des lèvres, il n'a plus ce genre de délicatesse pour son ombre aujourd'hui. Il hausse les épaules, que veux-tu maritorne d'avril ? Ainsi va la vie au fond des crevasses. ‹ C'est des trucs que j'ai dit à personne avant et tu viens comme une fleur chez moi, me dire que tu savais déjà, je sais pas AVRIL TU AS VU › tu as vu il ne faut pas parler fort, il calme sur un silence le fauve de sa douleur. Il se reprend sur un rictus mordu, son poing se serre dans la poche, là, là, tout doux, ça fait plus mal quand il crie : il sait que les mots seront toujours là alors c'est inutile, il a une nuit millénaire pour parler du plomb dans les ailes. ‹ tu as vu que ça allait pas, et même pas t'as fait l'effort de faire comme si tu y savais quelque chose. › Il parcourt ce domaine en même temps qu'il le raconte : ah c'est tout autre chose d'en conter les angles à une ennemie vêtue de son sang. Voici le sombre lac de ma peine, voilà le saule de ma confiance. Comme vous le voyez il est tranché : ce sont des arbres qui meurent lorsqu'on les dégoûte de leur sève.

‹ Putain, Avril, réfléchis. Même si t'es sincère, t'as vraiment cru que je te ferais confiance à toi après ça ? Je préfèrerais crever tu vois. › Un rire fiévreux éclot irrésistiblement à ses lèvres, il est tremblant et percé de plaies : c'est un rempart bien solide pour couvrir ses larmes d'ombre. Son regard s'envole loin des soleils noirs, Ray n'en supporte plus l'éclat, et il veut garder ses yeux secs. ‹ Ça ira pas entre toi et moi, ok ? Tu perds ton temps. › Il inspire sur son poumon un dernier souffle de victoire, c'est le seul qui lui reste avant la mollesse sifflante de la nuit : tout à coup il est secoué de cette fièvre lasse, il enjambe le salon, ses doigts s'arrêtent sur la poignée de la porte. ‹ Donc, je ne vais te le dire autrement, s'il te plaît pars de chez moi pour ne pas te le dire autrement parce que je veux plus te voir. ›

Mais même ainsi, Ray n'ose plus affronter les tonnerres printaniers, il attend juste la fin des orages : il a trop souffert de la foudre, et son œil électrisé loin d'elle ne rêve plus que du noir.

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Dim 4 Fév 2018 - 21:17

le parfum

c'est trop tard qu'il te dit, pour s'excuser d'avoir percé cette bulle d'ombre ; il faut le laisser maintenant, il doit s'en retourner à sa forêt de mémoires, et perdre sa tête sur d'autres ronces que les tiennes. il faut le laisser avril - ses mots fielleux te l'ont dit : c'est trop tard, dans vos vieux jardins d'enfant, pour oser poser le doigt sur ses paupières gardées fermées.
car maintenant il faut partir.

tu sais quoi ? elle s'est traînée jusqu'à ta porte et regarde le couloir en face, immobile, retenue dans l'appartement qui ne veut plus d'elle - il faut partir. ses yeux vitreux ressassent comme sa triste gueule : je ne vais pas TE le dire autrement, s'il-TE-plaît pars de chez moi, parce que je ne veux plus TE voir. pourquoi tant d'acharnement ? ah, regarde, ce rire cruel - qui ne pose même pas la question.

alors tu sais quoi ? tu me connais si mal que ça ? pourtant c'est vrai que tu n'as jamais vu ce voile-ci posé sur sa tête indocile ; qui est-elle dans les champs de mars, pour aimer ainsi ce roi éroyaumé.
d'autre que le contre-jour du couronnement.

tu te rappelles quand je t'avais dit que je t'avais fait un cadeau vraiment spécial pour ton anniversaire, et qu'au final je t'avais dit que je l'avais perdu ? tu te rappelles cette... cette lettre que j'avais déchiré devant toi, en disant que c'était mal écrit et pas important ? ou cette chanson que j'avais écrite mais que je t'avais jamais chanté parce que, je cite, "ma voix ne peut pas porter le texte à sa juste valeur ?" on ne rigole plus trop sur les souches de confiance, on brave plutôt les rayons sanglants de l'adolescence conquise ; deux pas vers toi et elle ne s'est toujours pas effondrée. c'était un bouquet de magnolias, et deux trucs que j'avais écrit pour essayer de t'expliquer. et je me suis ravisée au dernier moment, parce que je- je me suis rappelée ce qui aurait pu m'arriver. quel est ce fantôme qui a posé sa main sur son épaule - et pourquoi veut-il la faire pleurer. ça t'aurait vraiment aidé que je fasse comme de si ? si oui je savais vraiment pas. je m'étais dit que- que ça t'aurait encore plus perturbé, alors j'ai juste voulu le plus de temps possible avec toi, pour que t'y penses le moins possible et que- je sais pas, ça me saoule.

elle ne sait pas conclure autrement - ça me saoule, je peux pas partir, il n'y a plus personne pour m'enraciner dans le cœur abyssal de ray. avril est trop céleste pour ce genre de terreau ; et pourtant ces mots-là, ils l'ont fait redescendre d'un seul coup.

tu veux plus me voir ? et voilà la pluie à ses pétales de carne. désolée, mais je serai toujours là.
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Mer 7 Fév 2018 - 2:42

Tiens : les orages tonnent tous en avril. De dehors viennent courir des érinyes de blizzard, qui mangent toutes les floraisons vernales. Ray ne croit plus au soleil ni aux vapeurs chaudes des sangs d'amour, enfin, il ne croit plus en rien : il y a à ses yeux de montagne une averse qui le fait douter. A la folie des poitrails viennent se poser deux doigts de mauvais calme, une tiédeur abstruse qui achève de le découronner. Alors, alors si les fleurs piquent encore avec les couleurs des havres, c'est qu'il y a des couleuvres dans tous les édens hein : un fauve affamé d'ombre dévore la fin de ses certitudes. ‹  ... Je vois. C'est bête alors. › Oui, oui, c'est bête. Elle s'est dérobée à des courants d'air roses, et il ne la trouve plus que sur des corniches de tragédie. C'est bête.

‹  Je pense vraiment que c'est mieux que tu partes. › Sans plus d'assurance à l'orée de ses cils maintenant, sa voix vacille là où la nuit court. A la nuée de sa tête, des scarabées sans malheur tricotent des nuances aveugles : Ray est perdu à la dévotion de sa douleur, qui n'a plus de source à blâmer. ‹  Tu fais ce que tu veux › car : comment plier à ses borées de pacotille une force absonce de la nature telle que toi, nymphe bronze de tous les avrils, ‹  mais si tu veux me rendre service, pars pour l'instant. › même au temps tu ne te plies pas : c'est une demande qu'il implore maintenant. Il ne se soustrait pas à la politesse des vaincus - son humilité sanglante perle maladroitement à la bordure de son cœur, et ses phalanges se resserrent sur la poignée. Il veut son fief désert et stérile à l'obscurité environnante, là où la brume siffle son nom et les marées caligineuses sont familières : là où les magnolias ne poussent pas (pas tout de suite) et où on ne chante rien, où l'on n'écrit pas en son nom ni en celui des lourdeurs de bitume. Car - comment en vouloir à cette sylphide de fer, maintenant : Ray ne demande que de le laisser digérer l'alcool amer des fatalités. C'est une immensité tiède qui renverse sa pensée : car ses larmes n'ont plus de nom, et celles d'Avril leur ressemblent trop. Il ne résiste plus à l'écroulement de tous les barrages. Une troisième fois, une troisième fois presser le silence pour garder cachées ses racines bousillées, ‹  S'il te plaît › ne fais pas courir ces rivières folles où je ne peux m'abreuver. ‹  j'ai besoin d'être seul. ›

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Sam 10 Fév 2018 - 16:57

le parfum

c'est calme - c'est calme mais c'est bête, ce doigt posé sur son sang de colère. avril a la nuque encore fleurie de ces parfums d'autres mistrals, gorgée de couronnes d'ivoire ah : ça va mieux maintenant. il y a de la lumière dans toutes les plages, et ray a crié à la mer - je voudrai que tu partes.

alors elle se retire.

il lui aura fallu du temps pour le comprendre, à cette petite fleur rose. mais maintenant qu'elle n'a plus de pétales à offrir ; elle peut se retirer sans pleurer.

sa bouche s'ouvre comme pour dire - d'accord, ok, au revoir. mais il n'y a plus rien à dire à l'horizon éligné : on a déjà tout dit, d'accord, ok, au revoir, je t'aime.

alors son bras bouge un peu puis - non, il faut fermer la porte.

Tous sortent, excepté le Roi et le Parfum.
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