C'est avec une terrible faim au ventre que tu t'aventures ce jour-là hors de ton appartement et profite du temps libre que t'offre ton jour de congé pour le ruiner en t'aventurant dans une quelconque supérette. Sans prêter ne serait-ce qu'une seule seconde aux marques, aux prix, ou encore aux emballages tu empiles de façon casse-gueule une montagne de produits alimentaires plus ou moins sélectionner par ton estomac criant famine.
Pourtant, tu as cette facilité à te laisser littéralement mourir de faim par pure paresse et préfère à la cuisine les joies de lézarder les jours où tu n'as pas à t'asseoir derrière un bureau pour essayer d'arranger les déboires sentimentaux de tous ceux qui viennent faire de toi un éphémère exutoire. Alors ce qui t'as poussé à mettre le nez dehors, ce n'était pas la faim qui te cisaillait l'estomac, non. Tout cela était justifié par le simple fait que tu as horreur de boire l'estomac vide et qu'il se trouvait être en ta possession une bouteille de vin qui promettait d'être tout à fait exquise. Tu savais ton rapport à l'alcool tout à fait anormal, mais étonnement, tu pouvais tout à fait fait preuve de bienveillance envers ton organisme qui méritait presque tout sauf se retrouver submerger impuissant par une vinasse impossible à éponger.
Une fois tes achats soigneusement disposé dans un sac en papier, tu déambules les yeux levé sur le ciel d'un ton rouge-orangé crépusculaire pour finir par mentalement te flageller en te remémorant à quel point tu peux, parfois, gâcher tes journées. Enfin, bien avant d'avoir dirigé à ton propre égard bien trop de critiques, l'appartement se dessine à l'horizon.
Tu fouilles dans les abîmes de la poche gauche de ta veste tes clefs et ne remarque pas immédiatement le curieux individu qui semblait faire le pied de grue devant chez toi. Ce qui interpelle ton esprit distrait en revanche sont les cris de plaisirs qui semblent résonner à l'intérieur de l'appartement et qui ne t'arrache à toi qu'un soupire agacé. Tu fais claquer ta langue sur ton palet puis remarque du coin de l’œil la silhouette qui se tenait là depuis le début. Tu fais de ton mieux pour garder ta contenance lorsque apparaît devant tes yeux Gabriel, l'un de tes patients. Tu fais battre tes cils puis écarquille les yeux l'air interdit. Puis un ange passe. Un ange passe avant que tu ne parviennes à formuler un semblant de phrase.
Bonjour, tu commences visiblement sur la réserve. L'horreur de mélanger vie privée et vie professionnelle te saute à la gorge, mais tu t'évertues de ne rien laisser paraître. Y parviens-tu seulement ?
C'est devant cette porte-ci, tu la désignes aussitôt d'un mouvement bref de la tête,
que vous attendez ? Je pense que vous avez dû vous tromper d'appartement, car il s'agit du mien.