Le souffle d'un vent capricieux se glisse dans la pièce. Il dérange, fait valser quelques fines mèches de tes cheveux sur ton visage endormi. Tu sombres souvent ces derniers temps. Que tu coules sous de longs filets d'or de whisky, que tu coules après t'être fait emporter par la vague de l'asthénie. Tu sombres.
De faibles notes s'efforcent de percer le tissu de l'oreiller pour à peine te parvenir. Juste assez pour ouvrir un œil. D'un geste maladroit tu attrapes ton téléphone à la volée et déverrouille ton écran. Un appel manqué. Même si ton esprit demeure encore dans une brume onirique, tu écoutes le message. Maddison. Elle est étrange Maddison. Elle ne ressemble pas aux autres Maddison. Près d'elle, tu ne suffoques pas autant qu'avec les autres femmes. Elle a ce franc parler, cette gestuelle presque brutale parfois que tu connais aux hommes. Elle a des étincelles dans le regard et du feu dans son sourire. Tu n'es pas complètement serein avec elle, mais bien plus qu'avec les autres.
Alors tu pianotes à l'aveuglette une réponse car tu sais que tu ne pourras pas y échapper. Désolé, je dormais. Je t'attendrais devant le café qui fait l'angle pas loin de mon appart'. Fais gaffe sur la route. Ton doigt s'écrase sur l'écran une dernière fois avant que tu ne te hisses hors de ton lit. Tu passes une main nonchalante dans tes cheveux que tu renverses en arrière, comme à ton habitude. Tu enfiles une paire de jeans noir de nuit, une chemise blanche que tu retrousses jusqu'à tes coudes puis passe une veste. Il ne te faut pas plus que ça pour te mettre finalement en route jusqu'au point de rendez-vous. Tu y retrouves la tornade rousse, toujours aussi électrique et te saisis du casque tendu sans chercher ton reste. Tu enfournes sa bécane et enroule un bras autour de sa taille sans savoir ce qui te met le plus mal à l'aise ; la vitesse ou bien elle ?
En un éclair, vous voilà presque arrivés à destination. Tu poses pied-à-terre, t'extirpe du casque et ébouriffe brièvement tes cheveux. Ce soir-là, tu as appris que la pudeur lui est une notion étrangère. Comme frappé par la foudre, tu te retournes pour ne pas lorgner sur son corps dénudé et te pose en garde de toute ta grandeur, bien décidé à la protéger des regards lubriques que pouvait générer son attitude légère.
Moi aussi, tu bafouilles pour toute réponse après qu'elle se soit changée. Tu forces un sourire maladroit et te laisse entraîner jusqu'à l'intérieur pour d'abord y déposer le casque contre une pièce puis ensuite filer jusqu'à la salle principale. Tu la balayes d'un regard circulaire, détaille le mobilier, les lumières ou encore le choix de la musique qui te sont finalement bien égal. Ce n'était pas pour ça que tu avais accepté de tenir compagnie à la demoiselle. Tu plonges ton regard sur la rouquine à ton bras puis inspire à plein poumons.
Je t'offre un truc à boire ? tu lui souffles à l'oreille pour reculer ensuite et observer son visage sur lequel réverbèrent joliment les lumières colorées de la pièce.